Brest : Banksy au cœur d’une exposition exceptionnelle

À Brest, coup d’envoi ce samedi d’une exposition exceptionnelle consacrée à Banksy, cet artiste mystérieux de street art, l’un des plus connus au monde et dont l’identité n’a pourtant jamais été dévoilée.

Banksy expose ses œuvres dans la rue, sur des murs du monde entier. Il partage des vidéos de son travail sur les réseaux sociaux mais sans jamais montrer son visage. Ses œuvres dénoncent la guerre, le racisme, la société de consommation, la condition des femmes, celle des animaux…

À Brest, l’exposition est gratuite et c’est la seule à ce jour qui n’a pas été dénoncée par l’artiste lui-même. 300 œuvres seront visibles aux Ateliers des Capucins jusqu’au 25 juin. Elles ont été rassemblées par François Bérardino alias Béru, collectionneur et comédien. Nous l’avons rencontré.

Quelles sont les œuvres que les visiteurs peuvent découvrir à la Banksy Modeste Collection ?

Le public peut découvrir une collection de plusieurs objets. Il y a des pochettes de vinyles, des cartes postales, des affiches, des sérigraphies, des photos, des livres, des parutions… Enfin, tout un tas d’objets hétéroclites mais toujours illustrés par l’artiste, issus de son travail. Ce sont des supports fragiles et c’est surtout pour faire découvrir au public une dimension un peu méconnue de Banksy.

Quelle est la spécificité de votre exposition ?

La spécificité, si c’en est une, c’est qu’elle est gratuite. C’est l’une des rares de l’artiste qui est gratuite. On fait aussi appel aux dons pour les associations locales, basées à Brest, afin que ces associations locales aient plus de visibilité.

Les œuvres exposées permettent-elles au public de mieux comprendre Banksy ?

De mieux le comprendre, je ne sais pas. Mais de mieux se comprendre, eux-mêmes, oui, puisque l’artiste nous met face à nos contradictions à travers ses images. Ils vont découvrir un côté qui n’est pas forcément le côté "bankable" de l’artiste avec des œuvres vendues à plusieurs millions d’euros. Ils vont pouvoir découvrir tout ce pan méconnu ou peu connu de Banksy qui est très intéressant. Parce que chaque objet, ici, raconte une histoire. Une histoire parfois d’actions militantes de l’artiste, lui-même.

Comment avez-vous fait pour rassembler toutes ces œuvres de l’artiste ?

Avec beaucoup de patience, avec pas mal d’argent aussi mais à petite dose parce que je n’ai pas un gros budget. Donc je m’allouais un budget chaque mois sur environ 17 ans. J’ai pris mon temps, un peu comme un philatéliste qui cherche LE timbre à rajouter à sa collection. J’ai fait ça simplement, sans l’idée d’en faire un jour une exposition. Ça s’est fait naturellement, en fait.

Qu'est-ce qui vous plaît autant chez Banksy ?

J’ai l’impression qu’il s’exprime comme tout le monde, en fait. Il fait appel aussi à notre bon sens. Il nous met face à nos propres contradictions, vis-à-vis de notre façon de consommer, notre façon de consommer les loisirs aussi, de nous nourrir, de réfléchir sur la guerre, la paix, l’amour, la condition des enfants, la condition des femmes… Plein de messages, en fait, à travers ses images. Il nous met face à nos propres fantômes parfois.

Vous avez rencontré Banksy il y a 17 ans (l'artiste, sans donner son identité, avait offert à Béru deux de ses oeuvres après un spectacle donné par le comédien dans les rues de Londres. Béru avait fait le rapprochement avec Bansky quelques mois plus tard en feuilletant un livre recensant des oeuvres de l'artiste). L’avez-vous revu depuis ?

Non, je ne l’ai pas revu depuis, malheureusement.

Que pouvez-vous nous dire à son sujet ?

Il est comme tout un chacun. Il est comme vous et moi. Je vais quand même vous donner une réponse… Plutôt que de savoir qui il est, il faudrait savoir ce qu'est Banksy, voilà.

Vous imaginiez, un jour, exposer votre collection personnelle au grand public ?

Non, pas du tout. Parce que ce n’est pas mon métier. En plus, en le faisant, je me rends compte que c’est quand même une tannée (rires). C’est beaucoup de travail, c’est beaucoup de préparation, c’est beaucoup de stress mais c’est beaucoup de plaisir aussi. Mon premier plaisir, c’est de voir le tout réuni dans son ensemble et de voir des enfants dessiner à la craie, parce qu’on a aussi un mur d’expressions, des enfants qui rigolent, qui prennent des photos, des gens de toutes générations confondues qui sont devant les œuvres et de voir, qu’en plus, ça fonctionne. Notre objectif est atteint car on arrive à récolter des fonds et à les redistribuer. Ça, c’est une énorme victoire.

Banksy n'a pas dénoncé cette exposition. Est-ce parce qu'elle est gratuite ?

Oui, je pense que c’est parce qu’elle est gratuite. Tout le monde peut utiliser les images de Banksy. En revanche, il faut accepter certaines conditions. Il faut que ce soit pour des actions militantes et à but non lucratif, ne pas gagner d’argent avec un travail qui n’est pas le nôtre. Tant qu’on respecte cette charte, on n’est pas dénoncés. Cela étant, on n’est pas autorisés non plus et on n’est pas non autorisés. Mais on ne nuit pas à sa réputation et on ne gagne pas d’argent sur son dos, voilà.

Entretien retranscrit par Mikaël Le Gac