CHU de Nantes : un clip pour inviter Grand Corps Malade

29 octobre 2021 à 11h04 par Alexandrine Douet

Les patients et soignants du centre de rééducation du CHU de Nantes se sont mis en scène dans une vidéo sur la chanson « Pas essentiel » signée Grand Corps Malade.

Un clip pour faire venir Grand Corps Malade
Les patients et soignants du centre de rééducation du CHU de Nantes ont tous accepté de jouer le jeu
Crédit : Capture Youtube

Depuis sa mise ligne il y a quelques jours sur Youtube, le clip enregistre plusieurs milliers de vues (plus de 15 000 au moment de l'écriture de cet article).  Les participants espèrent maintenant attirer l'attention du chanteur et lui donner envie de venir au sein de la structure.
Le projet a été proposé par l’APRAIH, l’association Recherche et Animation pour l’insertion dans le handicap. 

Entretien avec Julie Potteeuw, kinésithérapeute et présidente de l'APRAIH.

Comment est née l’idée de ce clip ?

On propose des animations, notamment aux patients hospitalisés en médecine physique et de réadaptation à l’hôpital Saint-Jacques. On a toujours mené des petits projets comme ça. Évidemment, avec la crise sanitaire, tout s’était arrêté complètement. Et puis, un déclic un jour d’avoir envie de faire venir Grand Corps Malade en concert ou au moins pour échanger avec les patients, pour vivre une aventure un peu cool, un peu hors du commun avec eux. Au début, on a emprunté des chemins un peu standards, on lui a écrit, on a essayé de l’interpeller comme ça sur les réseaux… Et puis un jour, une collègue arrive au travail et me dit : « Mais Julie, je sais, on va faire un clip sur l’une de ces chansons. On va choisir la chanson pour l’interpeller, pour lui donner envie de venir, quelque chose qui nous ressemble ». On a écouté pas mal de chanson de Grands Corps Malade, et on a choisi «Pas Essentiel» parce qu’elle était sortie après un des confinements, qu’elle évoquait pas mal de choses, tout ce qu’on n’avait pas pu faire pendant un certain temps. Et puis, les choses sont venues comme ça. Le clip, finalement, d’une idée comme ça lancée, on a continué, on a commencé à tourner des scènes sans trop savoir ce qu’on voulait, et puis après, on a fait tout le déroulé de ce qu’on voulait montrer. Et puis voilà, le résultat est là aujourd’hui avec ce clip.

Ça n’a pas été trop compliqué de convaincre certains personnels soignants et certains patients d’être filmés ?

La motivation et le fait de se mettre face caméra, ce n’est pas du tout ce qui nous a posé de soucis. En fait, quand on a eu l’idée, on a commencé à en parler à quelques personnes, quelques patients et soignants. Tout le monde a été emballé par l’idée mais nous a un peu regardé en nous disant : « Ouais, d’accord, on verra bien ce que ça donne ». Et puis tout de suite en fait, on a couplé, on n’a fait que des scènes avec des patients et des soignants. Parce qu’on passe énormément de temps ensemble, que ce projet, on savait que ce serait aussi pour montrer ça, pour montrer notre relation au quotidien, pour montrer les échanges qu’on a avec eux, la complicité aussi qu’on peut avoir avec eux. La motivation n’a pas été un souci, même être à l’écran finalement, et accepter cette image, accepter le handicap, en fait, le montrer de cette manière, l’avoir mis en scène comme ça, être allé au-delà de la simple image du fauteuil roulant, etc... C’était ce qu’on voulait montrer.

Vous vouliez montrer que ce n’est pas drôle d’être dans ce type de centre mais qu’il y a de la vie et qu’il peut aussi y avoir des moments d’échange et de joie ?

Exactement ! En fait, je suis kinésithérapeute dans l’unité qui s’occupe des patients paraplégiques et tétraplégiques. Et c’est vrai qu’on vit des gros moments de vie avec des grands bouleversements, avec l’arrivée d’un grand handicap, avec une rééducation qui peut être longue. On prend en charge des patients, ça peut aller de trois mois jusqu’à trois ans, on les voit beaucoup, on vit une relation particulière quand même avec eux au quotidien, malgré cette lourdeur, malgré ce handicap. Il y a plein de stades à passer et on ne rigole pas tous les jours mais nous notre travail c’est d’amener ça, on amène de la vie, on amène le sourire, on amène l’espoir… Et surtout, on a un autre regard sur le handicap, parce que le handicap c’est notre travail, c’est notre vie au quotidien. On leur montre tout ce qu’il y a au-delà du handicap, on leur dit : « Et après ». Donc, ce projet, évidemment, ça pousse, ça permet d’avancer, ça permet de penser à autre chose, ça permet d’être dans la joie, je pense. Je vois ça comme ça.

Votre association propose quel type d'animations ?

Au sein du centre de rééducation, sur les temps un peu « calmes », le soir et le week-end, on essaye d’intervenir en organisant des soirées cinéma, on a fait des soirées théâtre, de la musique, enfin, il se passe plein de choses, jeux de société, etc. Au-delà de ça, il y a aussi des sorties qui sont proposées à l’extérieur, puisque le but, c’est aussi d’aller à l’extérieur, voir des matchs de foot. Simplement faire tout ce que les gens ont envie de faire, aller à la mer, voilà, plein de choses comme ça.

Pensez-vous que Grand Corps Malade va venir ?

Pour l’instant, on reste un petit peu dans l’interrogation. On ne sait pas s’il a vu le clip, on ne sait pas s’il a été interpellé, on n’a pas de message, on envoie plein d’appel. Ça prend de l’ampleur, on a beaucoup d’espoir, on a cette envie et puis on a vraiment envie de l’accueillir, on a envie de lui montrer ce qu’on a montré dans le clip et de partager un moment avec eux. Je pense que pour beaucoup de patients ce serait vraiment chouette.

Parce que lui aussi a eu ce parcours particulier ?

Tout à fait. Parce que lui aussi a vécu ce parcours, parce que lui aussi a une lésion médullaire, il a connu ça et ce temps de rééducation, de grands chamboulements. Donc, évidemment, je sais très bien qu’il sera touché par cette démarche et que ça évoque plein de choses pour lui. Cela étant, sera-t-il en capacité de répondre à notre demande, ça on ne le sait pas mais on a décidé, en tout cas, d’aller jusqu’au bout et de dérouler la démarche au maximum pour l’inciter à venir.

Il ne reste plus qu’à croiser les doigts pour qu’il vienne ?

Oui, on croise les doigts. Pour nous, c’est important de pouvoir sensibiliser, d’avoir cet autre regard sur le handicap et de pouvoir toucher les gens. Là, tout ça, ce n’est que du positif, c’est super ce qu’il se passe, pas que pour l’association, pour tout le monde, pour tous les gens qui ont participé à ce projet, pour tout ce que ça entraîne déjà aujourd’hui quel que soit la suite.