Déconfinement : qu'est-ce que le "contact tracing" ?

20 avril 2020 à 9h05 par Arnaud Laurenti

Le "contact tracing" est une technologie évoquée ces derniers jours comme préalable à un déconfinement. En quoi consiste ce dispositif et pourquoi inquiète-t-il ? On fait le point.

ALOUETTE
Crédit : Archives

Comment éviter un "rebond" de l'épidémie de Covid-19 lors du déconfinement ? C'est la question à laquelle tentent de répondre de nombreux pays, dont la France. Le gouvernement a annoncé travailler sur une application mobile (Stop Covid) qui s'appuierait sur le "contact tracing". Voici ce qu'implique l'utilisation de cette technologie.

Fonctionnement

Afin de pouvoir suivre au plus près et le plus efficacement possible les personnes atteintes du Covid-19, et ainsi juguler l'épidémie, les autorités ont réfléchi à un dispositif le plus large possible. L'attention s'est évidémment portée sur les smartphones, des appareils bourrés de capteurs et utilisés par une large majorité de la population. 

Concrètement, les États envisagent la possibilité de tracer les utilisateurs via une application installée sur le smartphone et utilisant la technologie Bluetooth. Un temps envisagée, l'utilisation des données GPS pose d'importantes questions éthiques et manquerait de précision.

Le Bluetooth : comment ça marche ?

Le Bluetooth est une technologie dite de "courte distance". L'application mobile que souhaite développer les États fonctionnerait ainsi : chaque utilisateur diffuserait un code anonyme qui lui est propre, et recevrait sur son terminal les codes des personnes autour de lui. Ces codes resteraient stockés dans le terminal durant un certain temps (au moins 14 jours) et permettraient d'identifier les personnes entrées en contact avec un porteur du Covid-19. La technologie permettrait d'évaluer la distance à laquelle se trouvait le porteur des personnes qu'il a croisées et ainsi de les alerter.

L'avantage de la technologie Bluetooth, c'est qu'elle ne repose finalement pas sur des données de localisation : elle ne transmet que la position d'un utilisateur par rapport à un autre, et non le lieu où ces derniers se trouvent. Par ailleurs, l'utilisation de codes anonymes permet de ne pas révéler l'identité des personnes concernées.

La gestion de ces informations serait confiée à l'agence sanitaire de chaque pays.

Est-ce que ça fonctionne ?

La technologie a déjà été utilisée en Corée du Sud et à Singapour, et visiblement avec succès. Ce contact tracing numérique s'est toutefois accompagné d'un suivi plus classique, sur le terrain, auprès de professionnels de santé.

La fiabilité d'un tel dispositif dépend également du nombre de personnes utilisant l'application : son utilisation doit être la plus large possible. Or, pour le moment, Emmanuel Macron a évoqué une utilisation basée sur le volontariat.

Enfin, la question de la fiabilité de la technologie Bluetooth reste à démontrer. Quel degré de précision offre-t-elle réellement ? Tous les appareils sont-ils égaux ? Deux utilisateurs séparés par une cloison (dans un immeuble par exemple) seront-ils considérés comme proches ? 

En France, l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) procède actuellement à des tests. Les résultats ne sont pour le moment pas encore connus.

Apple et Google forment une alliance

Mais les choses pourraient aller vite. Le 11 avril dernier, les deux géants du secteur numérique, Apple et Google, ont annoncé un partenariat pour permettre le suivi numérique des individus ayant été à proximité des personnes infectées.

"Google et Apple annoncent un effort conjoint pour permettre l'utilisation de la technologie Bluetooth dans le but d'aider les gouvernements et les agences de santé à réduire la propagation du virus, en intégrant la confidentialité et la sécurité des utilisateurs au coeur de la conception", ont indiqué les deux géants technologiques dans un billet de blog.

Des smartphones équipés du logiciel iOS d'Apple ou Android de Google pourront ainsi échanger des informations via Bluetooth, afin d'assurer le suivi des contacts humains ("contact tracing") et d'alerter les autres utilisateurs.

À partir de mai, les utilisateurs d'appareils iOS et Android seront en mesure de partager des contenus issus d'applications officielles d'autorités de santé publique, téléchargeables depuis les boutiques en ligne des deux groupes.

Apple et Google prévoient, dans un second temps, de développer "une plateforme de suivi des contacts plus large [...] qui permettrait à davantage de personnes d'y participer, si elles choisissent d'y adhérer."

Les systèmes d'exploitation des deux groupes rivaux sont les plus utilisés sur les smartphones à travers la planète.

Enfin, si la question de la préservation des données liées à la vie privée est un motif d'inquiétude, les deux géants assurent avoir mis en place des garde-fous.