Florence Favrel-Feuillade : "Arriver à la tête du CHRU en pleine pandémie a été plutôt un atout"

8 mars 2021 à 6h30 par Marie PIRIOU

À l’occasion de la journée internationale des Droits des Femmes, nous avons échangé avec Florence Favrel-Feuillade, Directrice Générale du CHRU de Brest.

ALOUETTE
Florence Favrel-Feuillade, directrice du CHRU de Brest.
Crédit : Archives

Florence Favrel-Feuillade est la Directrice Générale du CHRU de Brest. Cela fait six mois qu’elle a pris la tête du CHRU. Elle est en effet arrivée en septembre dernier, en pleine crise sanitaire. Elle était auparavant directrice de la recherche à l’AP-HP, à Paris, qui représente 30 à 40 % de la recherche en France.

Pourquoi avoir candidaté au CHRU de Brest ? Quelles étaient vos motivations ?

Il y en a plusieurs motivations. D’abord je souhaitais prendre une chefferie d’établissement et plutôt un établissement universitaire compte tenu de mes fonctions antérieures au niveau de la recherche clinique et de l’innovation. Brest bénéficiait d’une image dynamique, en matière d’innovation justement. J’ai par ailleurs un attachement particulier pour la Bretagne.

Comment s’est passée votre arrivée à Brest en pleine pandémie ? Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez été confrontées ?

Cette pandémie était moins importante que celle que j’ai connue en Île-de-France où la première vague a été particulièrement intense. Mais arriver en pleine pandémie m’a mis tout de suite dans le bain avec la participation aux cellules de crise régulières qui permettent d’organiser et de réorganiser en permanence l’établissement dans le cadre de la gestion de la crise. Je dirais que cela a été plutôt un atout qu’un inconvénient, même si j’aspirais à pouvoir travailler sur des projets au long cours. Lorsque vous êtes sur une gestion de crise vous êtes plutôt dans la gestion de l’immédiateté. On a lancé au niveau de l’établissement la démarche de projets d’établissement qui nous permettra de dessiner notre feuille de route pour les cinq prochaines années, donc je dirais que cela a été un avantage et que cela ne nous empêche pas de pouvoir nous projeter sur l’avenir.

Le mois dernier, vous n’avez pas hésité à communiquer sur le fait que plusieurs soignants avaient eu des effets secondaires à la suite de la vaccination contre la Covid-19. Une telle honnêteté n’est pas si courante dans les fonctions de direction. Est-ce l’un de vos traits de caractère ?

Je pense que c’est plus fréquent qu’on ne l’imagine. En tout cas, dans les établissements où j’ai exercé, on a toujours eu tendance à être transparents sur les informations. On n’est pas les seuls à Brest à avoir signalé les effets secondaires du vaccin AstraZeneca, il y a eu des remontées dans beaucoup d’établissements au niveau national. Ces effets secondaires étaient prévus mais leur intensité nous a surpris. Je suis une personne plutôt honnête et transparente. Pour autant, est-ce que c’est une vraie différence par rapport à mes confrères ? Ce serait un petit peu présomptueux de ma part que de me qualifier comme ça.

Comment vivez-vous, à titre personnel, la situation actuelle ? Y a-t-il des jours plus compliqués que d’autres ?

Oui, il y a toujours des jours plus simples et d’autres plus compliqués. Quand on assume des responsabilités comme les miennes, on assume le fait d’avoir des choix difficiles à faire. De pouvoir emporter une communauté dans des projets, cela nécessite beaucoup d’énergie et beaucoup d’enthousiasme. Je dis qu’à chaque problème il y a une solution et qu’il faut toujours choisir la meilleure des solutions, ou la moins pire. Cela fait partie de notre exercice professionnel et de notre éthique professionnelle. Je n’ai pas de difficultés par rapport à ça. 

Arrivez-vous, malgré tout, à vous dégager du temps pour vous ?

Pour être tout à fait honnête, il est difficile de me dégager du temps en ce moment. C’était déjà le cas dans mes fonctions antérieures. On a des métiers qui sont très prenants, où on doit être présent, on doit apporter à ces équipes des réponses, donc, c’est exigeant mais ça fait partie du métier de Directrice Générale d’hôpital. J’aimerais avoir plus de temps pour moi pour pouvoir faire du sport. Là pour le coup, c’est compliqué avec la fermeture des piscines et des lieux de sport.

Est-ce que le fait d’être une femme influe dans la gestion d’un hôpital ?

Non, pas du tout. Qu’on soit une femme ou qu’on soit un homme, les défis et les difficultés sont les mêmes. Je ne crois pas qu’on les gère de manière si différente quand on est un homme ou une femme. La société a beaucoup évolué, aujourd’hui. Il y a de plus en plus de femmes qui exercent des métiers à responsabilités. Je dirais qu’il y a encore une difficulté à accéder à des hautes responsabilités et qu’il y a encore, en proportion, moins de femmes que d’hommes qui exercent des métiers à fortes responsabilités. Pour autant, je n’ai pas le sentiment que ce soit plus compliqué, une fois qu’on y est parvenu, quand on est une femme. En tout cas, je trouve qu’ici, à Brest, j’ai été accueillie avec beaucoup d’égard. Si je peux donner envie à d’autres femmes d’assumer des responsabilités, je les encourage à le faire !

Quel est votre regard en tant que professionnelle sur la place de la femme aujourd’hui dans le secteur de la Santé ?

Les femmes sont plus nombreuses à exercer des métiers dans le secteur de la Santé que les hommes. Quand on regarde les postes à responsabilités, elles sont minoritaires, encore très largement. On a donc encore des évolutions à faire pour favoriser leur accès à ces postes à responsabilités. Je pense que c’est plutôt aux femmes de porter cette ambition pour elles-mêmes. Elles doivent se dire qu’elles sont tout aussi capables que les hommes. Si elles en sont convaincues, il n’y a aucune raison pour que les choses ne s’inversent pas et elles auront autant accès aux postes à responsabilités que les hommes. Il faut qu’elles s’en donnent les moyens et je pense que c’est à la portée de beaucoup de femmes.

(Entretien retranscrit par Mikaël Le Gac)