Rachat des chantiers de l'Atlantique : un mois de plus pour Fincantieri

30 décembre 2020 à 14h48 par Julia Maz-Loumides

Le ministère de l'Économie a annoncé ce mercredi 30 décembre que le gouvernement français a accordé à l'italien Fincantieri une cinquième prolongation d'un mois pour finaliser le rachat des Chantiers de l'Atlantique, alors que l'offre expirait fin 2020.

ALOUETTE
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"Le gouvernement français propose à Fincantieri la prolongation de l'accord de vente et d'achat pour une nouvelle durée d'un mois", selon un message du ministère reçu par l'AFP. La Commission européenne réclame à Fincantieri des informations dans le cadre d'une enquête, tandis que l'entreprise italienne affirme de son côté avoir déjà fait tout ce qu'elle doit et peut faire pour cette acquisition.

Depuis la faillite de la maison mère sud-coréenne des Chantiers, l'entreprise de Saint-Nazaire, spécialisée dans les paquebots et navires militaires de grande taille, est détenue par l'État français (84,3% du capital), Naval Group (11,7%), les salariés (2,4%) et des sociétés locales (1,6%). Depuis 2017, un projet de cession prévoit que Fincantieri détienne 50% du capital, plus 1% supplémentaire prêté par l'État français -qui se réserve le droit de le reprendre si le groupe italien ne respectait pas ses engagements.

Le dossier est stratégique, le secteur de la construction des grands navires de croisière étant encore une chasse gardée européenne face à la concurrence asiatique. Trois chantiers se partagent le marché: les Chantiers de l'Atlantique, Fincantieri et l'allemand Meyer Werft. Or une alliance nouée entre l'entreprise italienne et le chinois CSCC pour construire des paquebots fait craindre de laisser entrer le loup dans la bergerie.

"La question du plan B est tabou"

"Depuis le début, on est farouchement opposé" à la vente, rappelle à l'AFP Nathalie Durand-Prinborgne, déléguée du syndicat FO aux Chantiers de l'Atlantique, en évoquant "le contrat de transfert de technologie entre Fincantieri et le chinois CSSC". Le maire socialiste de Saint-Nazaire David Samzun souhaite lui aussi "bien évidemment que cette vente n'aille pas jusqu'au bout", craignant une "perte de savoir-faire" des Chantiers qui pourraient devenir une "variable" d'ajustement pour Fincantieri.

Les Chantiers de l'Atlantique emploient 3.100 personnes et 5.000 sous-traitants français et étrangers. Sur le plan diplomatique, le dossier est sensible. Après la signature de l'accord pourtant durement négocié, c'est la France et l'Allemagne qui avaient saisi la Commission européenne. Le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte avait critiqué un comportement "ambigu" et "peu compréhensible" de Paris. Dans un rapport d'information publié fin octobre, les sénateurs français de la commission des Affaires économiques estimaient que "le silence de Fincantieri (face aux demandes de la Commission, NDLR) semblait témoigner de l'hésitation du groupe italien à poursuivre" le projet de rachat, auquel ils sont défavorables.

Pour autant, "la question du plan B est taboue. Il est impensable d'évoquer la moindre solution de remplacement compte tenu de nos relations avec l'Italie", a jugé le directeur général des Chantiers Laurent Castaing devant les sénateurs. D'après le maire de Saint-Nazaire pourtant, "il y a bien un plan B qui existe" mais "in fine c'est bien une décision politique qui est demandée".

(avec AFP)