Réunification de la Bretagne historique : ça s'agite !

20 février 2021 à 10h29 par Gabriel Macé

Vœu aux conseils municipaux de Nantes et Rennes, "Gwenn ha du" hissé à la mairie de Nantes, appel de 150 élus pour un référendum... L'idée de rattacher la Loire-Atlantique à la Bretagne refait surface.

ALOUETTE
Crédit : Archives

"On a l'impression que les planètes commencent à s'aligner", savoure Kévin Jézéquel, vice-président de l'association "A la bretonne", créée l'été dernier, qui mène une active campagne auprès des élus pour obtenir un référendum. Mais pourquoi la question de la réunification déchaine-t-elle à nouveau les passions dans l'Ouest ?

Cet espoir d'une réunification - certains préfèrent le terme de "rattachement" ou d'"union"- avait mobilisé des milliers de partisans dans les rues de Nantes en avril et septembre 2014. Puis connu un coup de frein après "l'échec" lors du redécoupage des régions sous François Hollande en 2015, explique Gael Briand, élu UDB (autonomiste) à Lorient. C'est alors le statu quo qui est retenu.

Mais une pétition qui a récolté plus de 100.000 signatures de citoyens de Loire-Atlantique en 2018 a relancé le débat.

Et depuis les municipales, les décisions, surtout symboliques, s'enchaînent : 17 décembre, le drapeau zébré flotte devant la mairie de Nantes pour "promouvoir la richesse culturelle bretonne".

Un mois plus tard, le 17 janvier, dans une tribune, 150 élus demandent à Emmanuel Macron "d'engager le processus législatif qui permettra dans un premier temps de consulter par référendum les électeurs de Loire-Atlantique sur leur souhait, ou non, de rejoindre la région Bretagne". Le 5 février, le conseil municipal de Nantes vote un vœu demandant au gouvernement d'organiser ce référendum "pour que l'aspiration démocratique des citoyens soit entendue". Un vœu voté quelques jours plus tard par le conseil municipal de Rennes.

"Tant que le problème ne sera pas réglé, on ira de sondages en sondages, de vœu en vœu par les différentes assemblées", constate Jean-Louis Jossic, fondateur du groupe nantais Tri Yann, fervent défenseur de la reconstitution d'une Bretagne historique, morcelée en 1941 par le régime de Vichy. "Tôt ou tard, il y aura un référendum, à partir du moment où la population le veut... Comme disait Victor Hugo, on n'arrête pas une idée en marche".

Horizon 2024 ?

Florian Le Teuff, adjoint à la mairie de Nantes et en charge des "enjeux bretons", une nouvelle délégation, "demande à l'Etat d'organiser ce référendum car c'est lui qui en a la compétence". Une instance doit être créée pour définir, en concertation avec l'Etat, "les modalités d'organisation", ajoute-t-il, estimant "raisonnable" son organisation à horizon 2024.

"Une loi est nécessaire pour qu'un tel référendum soit organisé", a rappelé Jean-Jacques Urvoas, ancien garde des Sceaux et maître de conférences en droit public à l'université de Bretagne occidentale. "En l'état actuel du droit, comme l'indique l'article 72-1 de la Constitution, sans mesure législative nouvelle, une consultation sur ce sujet et sur une seule partie du territoire est tout simplement impossible", relève-t-il.

Mais selon François de Rugy, qui s'était engagé en 2017 à proposer la réunification de la Bretagne, ce projet "pose un certain nombre de questions".

"Qui serait interrogé ? Les citoyens de Loire-Atlantique ? Les citoyens de Loire-Atlantique et des quatre autres départements bretons ? Et ceux des quatre autres départements des Pays de Loire ? Est-ce qu'il y a une réflexion sur la capitale régionale ?", s'interroge le chef de file LREM pour les régionales dans les Pays de la Loire, né à Nantes.

Il note toutefois que les "questions d'identité ne sont pas à balayer d'un revers de main".

Les modalités d'un hypothétique référendum seront d'autant plus scrutées que les souvenirs de la consultation sur l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes sont vivaces. En 2016, les électeurs de Loire-Atlantique avaient voté pour la construction du nouvel aéroport à plus de 55 % des voix. Mais en 2018 le gouvernement avait annoncé l'abandon du projet.

"Il y a eu ce raté, il ne faut pas reproduire les mêmes erreurs avec un référendum fait à la hâte. Il faut un vrai débat, avec des éléments de fond et des études d'impact sur l'emploi, l'aménagement du territoire ou la décentralisation", souligne M. Le Teuff.

(Avec AFP)