Vendée : ces oiseaux qui n’auraient jamais dû s’installer ici
Publié : 5 juin 2025 à 8h56 par Laura Vergne
Sur la côte Atlantique, les alouettes disparaissent, les cigognes s’installent, le climat bouscule la biodiversité.
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Ce jeudi 5 juin, c'est la journée mondiale de l’environnement. Un environnement qui change… et la biodiversité avec lui. À Champagné-les-Marais, en Vendée, la biodiversité se réinvente. Sous nos yeux, certaines espèces déclinent, d’autres s’adaptent.
Au marais de la Vacherie, quelques alouettes passent au-dessus de nos têtes.
"Malheureusement, c'est une espèce qui est encore commune, mais qui a perdu plus de 70 % de ses effectifs depuis une quarantaine d'années", explique Victor Turpaud-Fizzala, conservateur de la réserve de la Vacherie.
Un effondrement brutal, visible aussi chez les hirondelles ou les moineaux. En cause : les pesticides, la disparition des ressources alimentaires et les bouleversements des habitats agricoles. "Si vous mettez des désherbants, vous éliminez énormément de plantes, donc de graines. Tous les oiseaux granivores vont être impactés. Et avec les insecticides, c’est la nourriture des insectivores qui disparaît."
La réserve tente de limiter les dégâts. Ici, 230 espèces d’oiseaux sont encore recensées. Mais, alerte le conservateur : "Quand on dézoome, on se rend compte que c'est la dernière population nicheuse du Marais poitevin pour certaines espèces. Et à l’échelle nationale, parfois, il ne reste plus qu’une centaine de couples".
Alouette DR
La cigogne, opportuniste du changement climatique
Soudain, une ombre passe au-dessus de nos têtes. Une cigogne.
L’arrivée de cet oiseau emblématique raconte un autre volet du bouleversement climatique. Poussées par les hivers doux et la surabondance de nourriture, certaines cigognes ne migrent plus. "Pourquoi migrer et prendre de tels risques alors que tout est sur place ? Et surtout, quand on ne migre pas, on est les premiers rendus sur les sites de reproduction. On a les meilleures places.", raconte Victor Turpaud-Fizzala.
Alouette DR
Leur nouveau festin : l’écrevisse de Louisiane. Une espèce invasive qui prolifère dans le marais et déstabilise tout l’écosystème. "Tant mieux si ces espèces y répondent en essayant de limiter la pression. Mais il ne faut pas oublier que cette écrevisse a détruit énormément d'amphibiens, de libellules, de poissons et même de végétaux. C'est un poids énorme pour l'écosystème."
La cigogne prospère. Mais son expansion rapide n’est qu’un symptôme de plus des déséquilibres à l’œuvre.
Alouette DR
"On passe d'un extrême à l'autre"
Face à ces bouleversements, la réserve de la Vacherie tente de s’adapter. Avec ses 330 espèces de plantes et ses prairies gérées en partenariat avec les éleveurs locaux, elle reste un précieux réservoir de biodiversité. Mais l'équilibre est précaire.
"On a été surpris de la violence de l’évolution du climat. En 2022, on a eu neuf mois d’assec, puis en 2023, neuf mois d’inondation. On passe d’un extrême à l’autre", confie Victor Turpaud-Fizzala. Des à-coups difficiles à encaisser pour les écosystèmes comme pour les éleveurs.
L’enjeu dépasse la seule nature. Il touche l’agriculture, l’économie et le bien-être des humains eux-mêmes. "Sans l’environnement, l’agriculture s'effondrerait. Qui peut être insensible à un printemps silencieux ?" interroge le conservateur.
La préservation de ces marais n’est pas qu’une affaire de passionnés. C’est une lutte pour maintenir le vivant, dans toute sa complexité, alors que le climat accélère la cadence.