Deux-Sèvres : une enquête ouverte sur les gendarmes, plus de 2 ans après les violences de Sainte-Soline

Publié : 6 novembre 2025 à 10h13 par
Tom Briot - Journaliste

Tom Briot vous informe chaque jour sur alouette.fr.

Deux ans et demi après les affrontements à Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres, le ministère de l’Intérieur a ordonné l’ouverture d’une enquête administrative sur l’action des gendarmes déployés lors de ce rassemblement contre les "mégabassines".

De la prison ferme pour l'un des manifestants de Sainte-Soline
Crédit : Facebook | Bassines Non Merci

Cette décision intervient après la publication par Libération et Mediapart de vidéos tournées par les caméras-piétons des forces de l’ordre, révélant des pratiques illégales et des comportements violent. Ce jeudi matin, le ministre de l'Intérieur Laurent Nuñez a "condamné" les "propos" et "gestes" tenus par des gendarmes lors de la manifestation, réfutant toutefois le terme de "violences policières".

"Évidemment que je ne suis pas du tout content des propos que j'ai pu entendre. (...) C'est des propos que je condamne et pour lesquels j'ai demandé une enquête administrative" a-t-il déclaré. 

 

Des images accablantes

Les deux médias ont eu accès à des dizaines d’heures d’enregistrements réalisés le 25 mars 2023, jour où plus de 3 000 gendarmes avaient été mobilisés autour du chantier d’une retenue d’eau agricole.

Ces vidéos montrent des tirs de grenades en "tir tendu", une pratique formellement interdite car jugée trop dangereuse.

Des consignes explicites auraient même été données sur le terrain : "tendu, tendu, tendu", "vous balancez un tendu s'il le faut", "les gars, on les nique là, allez" peut-on entendre sur certains enregistrements.

 

Un bilan lourd

Le rassemblement, déclaré interdit, avait dégénéré en affrontements massifs : plus de 5 000 grenades lacrymogènes et explosives avaient été tirées pour repousser des manifestants armés de pierres et de cocktails Molotov.

Le bilan : 200 blessés côté manifestants, dont 40 graves (deux ayant été plongés dans le coma) et 45 blessés parmi les gendarmes.

Une enquête judiciaire avait déjà été ouverte à Rennes et confiée à l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), mais elle n’a pour l’instant débouché sur aucune mise en cause.

La Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) a confirmé avoir transmis l’ensemble des vidéos à la justice, sans formuler de commentaires. Le procureur de Rennes, lui, a précisé que si d’autres infractions apparaissaient sur ces images, elles devraient être signalées au parquet "ce qui n’a pas été le cas", a-t-il déclaré.

 

L’inquiétude d’un "sans suite"

Les blessés qui ont porté plainte redoutent désormais, avec cette enquête administrative, une issue sans suite judiciaire.

Dans un communiqué, ils dénoncent "la manière dont a été conduite cette enquête", estimant qu’elle laisse "clairement apparaître l’intention de classer sans suite". Leur avocate, Me Chloé Chalot, réclame l’ouverture d’une information judiciaire indépendante. 

 

Avec AFP