Sébastien Laurent : "Il va être grand temps de rouvrir !"

17 mars 2021 à 12h00 par Alexandrine DOUET

Sébastien Laurent, le directeur du zoo de La Boissière du Doré (44) et du Natur'zoo de Mervent (85) fait part de son ras-le-bol et de son incompréhension face à la fermeture des parcs animaliers depuis plus de 4 mois.

ALOUETTE
Shani le bébé rhinocéros né en décembre dernier et sa maman attendent avec impatience les visiteurs.
Crédit : Facebook | Zoo de La Boissière-du-Doré

Tout est prêt pour accueillir de nouveau le public et pourtant aucune date de réouverture n’est prévue pour l’instant. Sébastien Laurent à la tête de deux zoos en Loire-Atlantique et en Vendée ne cache pas son agacement et son impatience en raison du manque de visibilité. Malgré tout, le recrutement des saisonniers a commencé.

Vos parcs devaient rouvrir initialement leurs portes les 6 et 13 février. Vous aviez préparé cette réouverture avec l’espoir d’accueillir à nouveau le public ?

Oui, on avait vraiment espoir d’ouvrir les deux parcs comme d’habitude aux vacances de février, même si très vite on a bien compris que les vacances de février étaient terminées pour nous. On se rattachait toujours à l’espoir d’ouvrir quand même après les vacances début mars ou mi-mars. Aujourd’hui, on a toujours peu ou pas de visibilité sur une prochaine date de réouverture.

C’est ce manque de visibilité qui est le plus pénible pour vous ?

Oui, c’est compliqué parce qu’on aime bien prévoir les choses. Ça fait aujourd’hui quasiment un an jour pour jour où on navigue toujours un petit peu à vue. On ne sait rien. Quand on pose des questions, on a très peu de réponses. Quand on a des réponses, elles sont toujours vagues. On sait qu’on sera les premiers à rouvrir, on entend ça, mais aujourd’hui, il y a beaucoup de choses d’ouvertes et nous on n’en fait pas partie. L’Etat sait que la sécurité sanitaire est bien présente dans les parcs zoologiques, c’est ce qui fait qu’aujourd’hui on reste dans l’incompréhension la plus totale.

Il y a pour autant des parcs et des jardins publics qui sont ouverts ?

Oui, c’était le sujet de mon coup de colère. On a vu pendant les vacances de février, en plus d’une météo très favorable, que tous les jardins publics étaient ouverts. J’ai cité le Jardin des Plantes à Nantes qui a des portails ouverts le matin et fermés le soir, des jardins publics qui n’ont aucune surveillance et aucune sécurité sanitaire assurées pour accueillir du public. Je pense sincèrement qu’il y a beaucoup moins de risques de se promener dans un parc zoologique que de se promener dans la rue ou dans des magasins. Tant mieux pour les magasins qui sont ouverts, mais aujourd’hui, on a du mal à comprendre comment on peut mettre des milliers de personnes dans des magasins et interdire ces milliers de personnes d’aller dans les parcs zoologiques qui sont eux en plein air.

Comment est-ce que vous vous mobilisez auprès des autorités ?

On a tout fait, on a fait évidemment tout ce qui était possible. On est en permanence en contact avec l’Etat. Aujourd’hui, on est en relation avec des directeurs de cabinet de ministres en ligne directe. On sait qu’on a un appui qui forcément est de notre côté, mais l’idée du Gouvernement, qui gère absolument tout, c’est de laisser les robinets le plus fermés possible, en tout cas nous concernant. En mai dernier, Edouard Philippe avait laissé la main aux préfets, et aujourd’hui, c’est ce qu’on veut. On ne peut pas traiter une région comme Dunkerque comme les départements de la Vendée ou de Loire-Atlantique. Les chiffres sont complétement différents et les conditions sont complétement différentes aussi. Aujourd’hui, on est dans une région qui a été beaucoup plus épargnée que d'autres. Et que ce soit le tourisme, la culture ou la restauration, ce sont les trois grands perdants de la situation.

Vous avez un appui au niveau local ?

Oui, les élus évidemment sont de notre côté, même les préfectures de Vendée et de Loire-Atlantique sont derrière nous. Aujourd’hui, les préfets ont les pieds et mains liés, ils n’ont pas de moyens de déroger comme c’était le cas il y a un an au mois de mai dernier. Tant que tout est verrouillé là-haut, on ne peut pas rouvrir. On nous laisse entrevoir des dates après le week-end de Pâques, ça pourrait donc s’éclaircir début avril.

Vous êtes prêts à rouvrir et à accueillir à nouveau du public ?

Absolument, on a accueilli plus de 100 000 personnes l’année dernière dans de très bonnes conditions. Les gens se sont sentis en sécurité à l’intérieur des parcs. On est des professionnels de l’accueil touristique, on sait faire, on a des labellisations pour ça, on a en plus des protocoles qui ont été validés par différentes préfectures, c’est ça qu’on a du mal à comprendre. On sait que ça va revenir mais pas à la vitesse qu’on espérait et ça commence à faire long, on est fermés depuis le 29 octobre. Je vous laisse imaginer le moral des troupes, on est toujours à attendre. C’est difficile aussi de prévoir une saison, pour faire du recrutement de travailleurs saisonniers sans leur donner de date de départ, c’est assez frustrant.

Quel est le quotidien de vos zoos actuellement ?

La partie animalière n’a pas du tout changé, on a gardé les mêmes équipes animalières tout l’hiver, comme d’habitude. Le travail n’a absolument pas changé. C’est ça qui est difficile à faire comprendre aussi, c’est qu’on a des frais de fonctionnement qui sont les mêmes toute l’année. Il y a quelques bouches à nourrir. Aujourd’hui, on continue d’avancer avec toujours l’idée de maintenir le moral des équipes au plus haut, c’est ça qui est un petit peu dur. On a un spectacle d’oiseaux à préparer, on a plein de choses à mettre en place, et sans date de réouverture, ce n’est pas facile.

Quelle est la situation financière de vos parcs aujourd’hui ?

Aujourd’hui, elle est correcte, il n’y a pas d’inquiétudes là-dessus. On a eu la chance de faire, sur les deux parcs, un bon été l’an dernier, malgré un printemps évidemment catastrophique entre les inondations et le confinement. Un bon été qui nous a permis de passer l’hiver sans problèmes. Mais il va être grand temps quand même de rouvrir. Il faut relancer la saison !

(Entretien retranscrit par Mikaël le Gac)