StopCovid : le Parlement donne son feu vert au déploiement de l'application de traçage

28 mai 2020 à 6h03 par Arnaud Laurenti

Le Parlement a approuvé mercredi soir l'application pour smartphone StopCovid, censée contribuer à la lutte contre l'épidémie, malgré les inquiétudes.

ALOUETTE
Crédit : DR

Le gouvernement a l'intention de lancer l'application de traçage numérique dans les jours qui viennent afin d'accompagner la deuxième phase du déconfinement.

Un outil "utile" selon le gouvernement...

Devant l'Assemblée puis le Sénat en soirée, la ministre de la Justice Nicole Belloubet a longuement insisté sur les "garanties" entourant cette application "temporaire, d'installation volontaire, non identifiante et transparente".

Les députés ont approuvé ce projet controversé à une confortable majorité, par 338 voix contre 215, et 21 abstentions. Au Sénat, 186 sénateurs ont voté pour, dont une majorité du groupe LR, 127 ont voté contre et 29 se sont abstenus.

Ces deux votes, bien que sans valeur contraignante pour le gouvernement, constituent un motif de satisfaction pour le secrétaire d'Etat chargé du numérique Cédric O, en première ligne sur le sujet, alors que le Premier ministre, absent lors du débat parlementaire, paraît circonspect.

StopCovid "sera utile dans la lutte contre le virus. Notre seul objectif est de sauver des vies", a réagi Cédric O après le vote du Sénat.

... mais qui inquiète

À l'Assemblée, cinq "marcheurs" ont voté contre l'application, dont le député de la Vienne Sacha Houlié, en critiquant la "dangerosité" et "l'irréversibilité" de ce type d'outils. Treize se sont abstenus, comme Aurore Bergé. Hormis l'UDI, les groupes d'opposition de droite comme de gauche ont voté contre à la quasi unanimité, tout comme le RN.

Sur la base du volontariat, StopCovid permettra à une personne positive au coronavirus d'alerter automatiquement tous les utilisateurs avec lesquels elle a eu un "contact prolongé" récemment, à moins d'un mètre et durant plus de quinze minutes, afin qu'ils se fassent tester à leur tour.

Le gouvernement cible notamment les "urbains actifs", qui prennent les "transports en commun", croisent des "inconnus" dans les magasins...

Selon Cédric O, StopCovid "offre un complément utile et nécessaire" aux équipes sanitaires, qui retracent les personnes en contact avec des malades du coronavirus.

Les GAFA tenus à l'écart

L'application utilise la fonction Bluetooth et non la géolocalisation, et "il s'agit d'un projet français", a aussi souligné le secrétaire d'État.

Car contrairement à d'autres pays, le gouvernement a choisi de ne pas passer par les solutions de Google et Apple, et a sollicité des chercheurs d'Inria, l'institut français de recherche en informatique.

Les développeurs ont planché pour que leur solution soit compatible avec un maximum de mobiles, même si certains problèmes techniques persisteraient sur de "vieux téléphones" et des modèles Apple.

Le gouvernement a rappelé à plusieurs reprises le feu vert de la Commission nationale informatique et libertés (Cnil). Cette instance a estimé mardi que StopCovid respecte la législation relative à la vie privée, tout en réclamant une évaluation régulière et une information détaillée pour les utilisateurs.

"Cédric O a voulu aller au bout, comme il est sur le devant de la scène pour la première fois", glissait une source parlementaire avant ce débat. Mais "la question en suspens est l'adhésion des Français".

L'application devra aussi prouver son efficacité, mise en doute par des parlementaires hostiles au projet.

De l'association La Quadrature du net à la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), plusieurs organisations de défense des libertés ont pris position contre l'application.

(avec AFP)