Feu d'artifice mortel : "Tous les jours, c’est compliqué" : à Angers, les familles replongent dans la nuit du drame

Publié : 17 novembre 2025 à 18h26 par
Laura Vergne - Journaliste reporter

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À l’ouverture du procès du feu d’artifice mortel de Cholet, les victimes ont livré des récits bruts.

Plusieurs victimes du drame devant le tribunal d’Angers, ce lundi 17 novembre 2025.
Plusieurs victimes du drame devant le tribunal d’Angers, ce lundi 17 novembre 2025.
Crédit : Alouette DR

Plus de trois ans après la nuit du 14 juillet 2022, la voix de Sébastien Mandote au tribunal d'Angers ce lundi 17 novembre : "Tous les jours, c’est compliqué", confie le père de Sohan, 7 ans, et Maggie, 24 ans, tous deux morts ce soir-là. Devant le président Lionel Ascensi, il décrit  l'endroit où ils s'étaient placés pour assister au spectacle, l'absence de mesure de sécurité puis une "boule de feu" qui s'est abattue vers eux.

 

"J'ai beaucoup de colère"

À la barre, sa femme Sandra s’avance, les mains serrées. Elle pensait, être en sécurité à l'endroit où ils s'étaient installés avec leurs enfants, puisqu’ils avaient vu d’autres familles se placer au même niveau. La suite, elle la raconte en sanglots : "Je m’en veux énormément de ne pas avoir su protéger mes enfants." Ce qui reste, aujourd’hui ? "De la colère", avoue-t-elle, avant d’ajouter dans un souffle : "J’espère pouvoir rentrer dans le pardon." Tous deux évoquent des blessures qui durent : difficultés à travailler, à côtoyer le monde, troubles auditifs persistants. Une vie sectionnée en deux.

Sur le banc des parties civiles, Justine Rouillé, 19 ans, entend ces mots. Elle aussi était là, quelques mètres derrière la famille Mandote. "On a vu la fusée arriver sur nous", confie-t-elle au micro d’Alouette. Son amie, présente ce soir-là, résume la suite : "À 16 ans, on ne devrait pas voir ça. On a perdu une part de notre insouciance."

 

 

Justine Rouillé se trouvait juste derrière la famille Mandotte ce jour-là.
Justine Rouillé se trouvait juste derrière la famille Mandotte ce jour-là.
Crédit : Alouette DR

Mortiers défaillants, zone mal sécurisée

Après les témoignages, place à la technique. Le tribunal a passé en revue les photos aériennes prises le soir du drame. Elles montrent des familles installées à 30 mètres du pas de tir, alors que le périmètre de sécurité imposé par les normes pyrotechniques est de 150 mètres. Le président évoque la "fragilité des mortiers" utilisés par la société bretonne Féérie, anciennement HTP. Plusieurs étaient en mauvais état. Leur mise en œuvre, défaillante. Dès les premières minutes du spectacle, certains projectiles avaient déjà montré des signes anormaux.

C’est l’une de ces bombes qui a dévié, frappant directement la foule. L’artificier et son employeur sont poursuivis pour avoir "tiré un feu d’artifice alors que des personnes se trouvaient dans une zone interdite au public" et pour l’usage de matériel inadapté. Les deux jeunes femmes interrogées assurent que "personne" ne leur a demandé de reculer. 

 

Gilles Bourdouleix arrive au tribunal d'Angers ce lundi 17 novembre 2025 - Alouette DR

Une audience ouverte dans la tension

Dès les premières minutes du procès, la tension a été palpable. Les avocats de Cholet Événements, l’association organisatrice, ont demandé le renvoi du procès, estimant que certains acteurs, notamment la préfecture ou les forces de police, auraient dû figurer parmi les prévenus. Une demande sèchement rejetée par les parties civiles et le parquet. Une heure plus tard, face au refus général, ils se rétractent. Le procès peut commencer.

Présent à l’ouverture, le maire de Cholet Gilles Bourdouleix est poursuivi pour ne pas avoir imposé la mise en place d’un barriérage garantissant le respect de la zone interdite au public. Le procès doit durer toute la semaine, jusqu'à vendredi. Les prévenus encourent jusqu’à trois ans d’emprisonnement.