Dix ans après le 13 novembre : "La douleur ne disparaît pas, elle se transforme"

À l’occasion des 10 ans des attentats de Paris, l'ex-directrice de l’association France Victimes 37, Marie-Paule Carrey-Le Bas, revient sur ces jours d’une intensité exceptionnelle.

Lorsque les attentats ont frappé Paris, l’organisation de l’aide aux victimes a dû s’adapter à une situation sans précédent.

"Nous avions affaire à des événements inédits en France, de par l'ampleur des attaques, du nombre de victimes, des images en boucle", se souvient Marie-Paule Carrey-Le Bas.

"Le relais des proches"

Habituellement confrontés à des drames individuels ou collectifs mais moins importants, les services d’aide aux victimes ont dû faire face à une mobilisation d’urgence. Dès le lendemain, les associations locales ont été sollicitées par la cellule interministérielle d’aide aux victimes, chargée de relayer les demandes d’informations et de soutien des familles.

"Dès le premier jour, la fédération INAVEM, à laquelle nous appartenions, a été le relais des proches cherchant à savoir ce qu’étaient devenus leurs proches."

À Tours, l’équipe de France Victimes 37 a reçu des listes de personnes blessées, décédées ou simplement témoins, afin de les contacter. "Les familles étaient dans la sidération. Les premières questions portaient sur le concret : comment voir un proche, comment récupérer un corps, comment organiser les obsèques."

"Il faut absorber l’émotion que ces témoignages provoquent"

Dans les mois qui ont suivi, des formations spécifiques ont été mises en place dans toute la France. Des référents pour les victimes d’actes de terrorisme ont été désignés dans chaque département, afin d’améliorer la prise en charge et d’éviter l’improvisation.

Pour Marie-Paule Carrey-Le Bas, cette expérience a aussi été une épreuve personnelle :

"J’ai moi-même reçu les victimes, pour protéger mes collègues qui étaient aussi profondément marquées. Nous avons ensuite bénéficié d’un accompagnement psychologique, car il faut pouvoir absorber toute l’émotion que ces témoignages provoquent."

Une décennie après les faits, les images et les émotions restent vives comme l’explique Marie-Paule Carrey-Le Bas :

"Bien sûr, c’est quelque chose qui marque. Revoir ces images, c’est se reconfronter à la douleur. Si des victimes se sentent mal, il n’est jamais trop tard pour reprendre contact avec un service d’aide psychologique. La douleur ne disparaît pas, elle se transforme."