"J’ai cru que j’allais mourir" : dix ans après les attentats du 13 novembre, le témoignage d’un vigile du Bataclan

Publié : 13 novembre 2025 à 6h02 par
Tom Briot - Journaliste

Tom Briot vous informe chaque jour sur alouette.fr.

Dix ans après les attentats du 13 novembre 2015, le souvenir de cette nuit reste gravé dans la mémoire d’Hermann Aka. Aujourd’hui médiateur scolaire, il travaillait au Bataclan le soir du 13 novembre, en poste près de la loge des artistes.

Bataclan
Salle du Bataclan, en janvier 2024
Crédit : capture d'écran | GoogleMaps

"C’était une soirée où il y avait énormément de monde", se souvient Hermann Aka. "Mon poste, c’était près de la loge des artistes, près de la scène. Le concert avait débuté depuis une dizaine de minutes quand j’ai entendu des bruits de pétards. Au début, je pensais que ça faisait partie du show."

Très vite, il comprend que ces bruits ne sont pas des effets de scène : "Il y a eu d’autres détonations. C’est là que j’ai compris que ce n’était pas des pétards, mais des tirs de Kalachnikov." Le chaos s’installe.

Dans la salle, il y a des cris et des corps qui tombent au sol. "Le premier réflexe que j’ai eu, c’est d’aider les personnes qui étaient près de moi", raconte-t-il.

Hermann Aka, au micro d'Alouette
Crédit : Alouette | DR

"Je me suis vu partir"

Derrière une barrière de sécurité, il aide les spectateurs à trouver une issue : "Je les mettais derrière moi, tout en leur indiquant un point de sortie […] Je me suis vu partir. J'ai cru que j’allais mourir comme tout le monde. J’ai commencé à penser à ma famille, à mes amis, à plein d’images."

Puis, il décide de fuir à son tour. Dehors, la terreur continue. "Quand je sors, partout ça tire. Je vois des personnes tomber par terre. J’essaie d’en relever, mais je n’y arrive pas. C’était le chaos total." Herman court, alerte les passants, tente d’arrêter une voiture de police. "Je leur ai dit qu’au Bataclan, il se passait un drame."

Il aide ensuite les secours et les forces de l’ordre à évacuer les blessés. "Dans un hall d’immeuble, on avait improvisé un point de secours. Toutes les personnes blessées s’allongeaient pour qu’elles puissent se reposer."

 

"Je suis tout le temps en alerte"

Dix ans plus tard, Herman Aka vit toujours avec les séquelles de cette nuit. "J’y pense souvent. J’ai eu un suivi psychologique pendant longtemps. Parfois, j’ai des flashs, des cauchemars. Je suis tout le temps en alerte. C’est épuisant."

Hermann Aka, au micro d'Alouette
Crédit : Alouette | DR

Malgré tout, il participe aux cérémonies d’hommage. "C’est très important d’être présent pour toutes les familles des victimes", confie-t-il. Mais une part de culpabilité demeure : "Pendant longtemps, j’ai eu ce sentiment du devoir non accompli. De n’avoir pas pu aider assez de personnes."

Quant à Salah Abdeslam, le seul survivant des commandos du 13 novembre, il ne souhaite ni lui parler, ni lui pardonner.

Aujourd’hui encore, il poursuit sa reconstruction : "Ça a fait beaucoup de mal à ma famille. Certes, je n’ai pas été touché physiquement, mais psychologiquement, la reconstruction a été compliquée. Je me bats encore pour essayer de me reconstruire."