Brexit : l'inquiétude des pêcheurs bretons

25 mars 2019 à 10h22 par Rédaction Alouette

<p>Les pêcheurs de Bretagne craignent des changements radicaux après&nbsp;la sortie du Royaume-Uni de l'Union Europénne. Sans accord, l'accès aux eaux britanniques pourrait leur être interdit.</p>

ALOUETTE

"Cataclysme", "catastrophe", "bordel sans nom"... Les p�cheurs bretons sont sur le pied de guerre � l'approche du Brexit, qui pourrait les priver d'une grande partie de leurs ressources en poissons et cr�er d'�normes tensions dans la Manche.

"Un Brexit sans accord pour les p�cheurs, �a va �tre une vraie catastrophe. On est � deux doigts d'une guerre en Manche", tonne Alain Coudray, pr�sident du comit� des p�ches des C�tes-d'Armor, dans son bureau tapiss� d'une immense carte des c�tes bretonnes.

Leur pire crainte: un Brexit dur, sans accord avec le Royaume-Uni, qui interdirait l'acc�s des eaux britanniques du jour au lendemain. "�a serait un cataclysme", reconna�t Olivier Le Nezet, pr�sident du comit� des p�ches breton.

Le poisson p�ch� dans les eaux britanniques, "c'est 30% des ventes sous cri�e en Bretagne", elle-m�me premi�re r�gion fran�aise pour la p�che, selon Jacques Doudet, secr�taire g�n�ral du comit� r�gional des p�ches.

"Cent vingt navires pratiquent la p�che au moins une partie de l'ann�e dans les eaux britanniques", souligne-t-il.

Parmi les premiers concern�s, figurent les navires hauturiers, qui pratiquent la p�che au large. "On a l'impression d'�tre les oubli�s du Brexit", confie Dominique Thomas, patron armateur de l'�cume des jours, un bateau de 21 m�tres qui p�che � 90% dans les eaux britanniques, en Manche Ouest et en mer Celtique.

Son �quipage livre lottes, raies ou aiglefins tous les mercredis au port de Roscoff (Finist�re). Si les eaux britanniques sont interdites, "on va se retrouver avec les Belges et les Hollandais en Manche Ouest et on n'aura plus assez de place, y aura plus de cohabitation", pr�vient-il. "Il y aura des accidents avec les cargos et la ressource va �tre d�truite par la surp�che."

La crainte d'un "effet domino"

Sa crainte est aussi que tous les p�cheurs se retrouvent in fine p�nalis�s par le Brexit, via un effet domino qui verrait les hauturiers se rapprocher des c�tes et empi�ter sur les zones de p�che de leurs coll�gues. "�a va �tre une guerre entre fileyeurs, caseyeurs et chalutiers", affirme M. Thomas. "On va venir leur piquer leur pain."

La Bretagne compte environ 5.000 marins p�cheurs pour plus de 1.200 bateaux. Et six des dix plus grands ports de p�che fran�ais sont bretons, selon un classement de l'Union des ports de France. Le port de Lorient est en n�1, � la fois en termes de chiffre d'affaires et de tonnage de poissons vendus aux ench�res.

Des arr�ts temporaires de travail, financ�s par les fonds europ�ens, sont envisag�s en cas de Brexit dur. "Ils nous paieraient 70% de notre chiffre d'affaires 2017 pour rester � terre", explique Dominique Thomas. "Mais on n'ach�te pas un bateau pour rester dans le bassin. Et puis, il s'abime plus en restant le long du quai qu'en mer".

Un tel arr�t risquerait en outre de p�naliser toute la fili�re, de la construction navale, � la r�paration de bateaux, en passant par la transformation des poissons.

"On estime qu'un emploi en mer correspond � quatre emplois � terre. Des bateaux � quai, c'est des marins qui vont voir ailleurs, moins de r�paration navale, des mareyeurs qui n'ont plus de poisson � acheter", souligne Pierre Karleskind, vice-pr�sident (LREM) du conseil r�gional.

Rien que pour le secteur de la p�che, de la transformation et de la commercialisation, on recense 16.570 emplois en Bretagne, selon l'observatoire r�gional de l'�conomie maritime.

M�me un Brexit avec accord ne r�glerait rien, car la question de la p�che a �t� renvoy�e � des n�gociations ult�rieures. "Voir la p�che trait�e � part, �a nous inqui�te. En bout de course, les n�gociateurs seront �puis�s et les Britanniques ne l�cheront pas le morceau", estime Jacques Doudet.

Un contexte qui pourrait provoquer de fortes tensions sociales, selon certains. "On n'est pas les gilets jaunes, on n'est pas les blacks blocs mais on sait faire", pr�vient Alain Coudray. "Si les CRS sont �quip�s, nous aussi."

 

(Avec AFP)