Etat d'urgence sanitaire : des associations saisissent le Conseil d'Etat

2 avril 2020 à 11h02 par Arnaud Laurenti

Quatre associations ont saisi le Conseil d'Etat d'un premier recours sur la conformité à la Constitution de la loi sur "l'état d'urgence sanitaire", estimant qu'elle portait atteinte à la dignité et au principe de fraternité envers les plus démunis.

ALOUETTE
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Cette première question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui est adossée à une requête en référé déposée mercredi, vise les angles morts du texte "d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19" voté le 23 mars, un régime d'exception qui encadre le confinement du pays et impose une série de mesures restrictives des libertés.

Flou pour l'aide aux sans-abri et aux migrants

"Nous attaquons un texte qui ne prévoit pas de dispositions en vue de la protection des plus démunis. En l'absence de cadre légal général, bénévoles et vulnérables sont soumis au bon vouloir des mairies ou des préfectures concernées", a expliqué à l'AFP l'avocat Vincent Brengarth, qui défend les requérants avec William Bourdon.

Pour ces associations d'aide aux sans-abri et migrants, en "ne prévoyant aucune disposition de nature à protéger les personnes vulnérables et en portant ainsi atteinte à la sauvegarde de la dignité de la personne et au principe de fraternité", le législateur a méconnu la Loi fondamentale.

Elles rappellent que la Constitution impose, dans son article 34, que "la loi fixe les règles" concernant notamment "les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques".

Pour les associations Mouvement citoyen tous migrants, Soutien réseau hospitalité, Chemins pluriels et Utopia 56, ce sont bien des droits fondamentaux qui sont niés aux plus vulnérables : le droit à la vie, à ne pas subir de traitements inhumains et dégradants, à la protection de la santé ou à l'hébergement d'urgence.

Pas de délai pour l'étude du recours

Entrée en vigueur le 1er mars 2010, la QPC permet à tout justiciable de contester la conformité à la Constitution d'une loi qui lui est opposée et qui "porte atteinte aux droits et libertés" que la Loi fondamentale garantit. Elle est le seul moyen de contester les dispositions d'une loi après sa promulgation.

La loi organique adoptée dans la foulée de l'état d'urgence sanitaire suspend le délai de 3 mois dont dispose le Conseil d'Etat pour se prononcer sur une QPC, tout comme celui, de même durée, dont dispose le Conseil constitutionnel pour statuer.

Néanmoins l'exercice de ce recours n'est pas remis en cause, relèvent Mes Brengarth et Bourdon, soulignant que dans ces circonstances exceptionnelles, "un contrôle de constitutionnalité s'apparente à un contentieux essentiel".

(avec AFP)