Santé mentale : "c'est la goutte d'eau qui vient déclencher un trouble psychique"

La santé mentale, on en parle très régulièrement. Mais concrètement, qu'est-ce c'est ? Pour l'Organisation mondiale de la santé (OMS), il s'agit d'un état de bien-être mental qui nous permet d'affronter les sources de stress de la vie, de réaliser notre potentiel, de bien apprendre et de bien travailler, et de contribuer à la vie en communauté.

Ça, c'est lorsque tout va bien dans un monde idéal. Mais en réalité, la santé mentale peut se dégrader facilement, tout en nous mettant en difficulté, et développant parfois des troubles psychiques. Pour mieux cerner le sujet, Lucas (prénom d'emprunt), psychologue au CHU de Nantes, a accepté de répondre à nos questions au micro d'Alouette.

"On utilise la métaphore du verre d'eau qui déborde"

La santé mentale a été mise en exergue lors de la crise du Covid et des confinements successifs. Pendant cette période d'inquiétude et de stress, la santé mentale a été mise à rude épreuve, notamment chez les plus jeunes. Et elle s'est même dégradée. Car oui, la santé mentale peut se dégrader nous explique Lucas, psychologue au CHU de Nantes.

"On a chacun un patrimoine génétique. Qui dit patrimoine génétique dit de potentielles vulnérabilités. Il y a également des facteurs psychologiques, des traits de personnalité, la manière dont on va gérer le stress. Ensuite, il y aura les facteurs plutôt sociaux. On prend beaucoup cette métaphore du verre d'eau, où on se dit qu'on a un patrimoine génétique différent et parfois des vulnérabilités. On va donc avoir un verre de taille différente selon les personnes et selon nos parcours de vie. Les éléments stressants vont venir rajouter de l'eau dans le verre jusqu'à ce qu'il déborde au bout d'un moment, et donc déclencher l'apparition d'un trouble psychique."

Ce verre d'eau peut donc déborder très rapidement pour certains, plus lentement pour d'autres, et même jamais pour les plus chanceux. Comme l'explique Lucas, ce verre est de taille différente pour chaque individu, et il peut être déjà bien rempli pour certaines personnes, qui ont notamment vécu des traumatismes (agressions, violences sexuelles ou psychologiques...)

La santé mentale, grande cause nationale

La grande cause nationale de 2025 sera la santé mentale avait annoncé le président de la République, Emmanuel Macron. Une évidence face à l'ampleur du phénomène et du mal-être grandissant, notamment chez les adolescents. Mais concrètement, sur le terrain, la santé mentale apparaît-elle réellement la grande cause nationale ?

"Je ne le ressens pas comme ça, indique Lucas. "Je ne vois pas le fait que la santé mentale soit la grande cause nationale de 2025. En-tout-cas, je ne vois pas les moyens mis en place derrière puisqu'on assiste à des fermetures de lits, on a des difficultés pour recruter des médecins, des infirmiers, et parfois même des psychologues. Malheureusement, dans les projections qu'on peut avoir, ça ne va pas vraiment en s'arrangeant. Et on ne voit pas les choses s'arranger. On parle même de budget un peu plus resserré, alors qu'en parallèle, on assiste à une augmentation du nombre de demandes de prise en soin, notamment d'hospitalisation chez les jeunes. On a d'un côté une élévation de ce besoin-là, et puis de l'autre côté on met moins de moyen là-dedans. Nous, on le ressent comme étant un secteur vraiment en tension et en difficulté."

Si le nombre de suicides en France est stable, le nombre de jeunes filles hospitalisées continue de progresser indique Santé Publique France. +21% chez les adolescentes de 11 à 17 ans en 2024 par rapport à l'année précédente.

Pouvoir en parler à ses proches ou à un professionnel de santé

Hôpital Saint-Jacques de Nantes - Alouette DR

L'enjeu de ce genre de journée mondiale c'est de mettre l'accent sur la question de la sensibilisation à la santé mentale. L'important selon Lucas, c’est de pouvoir en parler rapidement à ses proches ou à un professionnel de santé afin d’être accompagné au mieux pour limiter l’émergence de troubles. Il est possible d'échanger à ce sujet avec son médecin traitant ou un psychologue par exemple. Il existe également des "maisons des adolescents".

Dans la région Pays de la Loire, les centres hospitaliers de Nantes, Angers et Le Mans ont mis en place le dispositif DIPPE, pour Détection et Intervention Précoce dans les troubles Psychotiques Émergents. Il permet notamment la détection précoce des troubles psychiques chez les personnes de 15 à 30 ans.