Tri Yann : "On est à la fois heureux et émus"

Publié : 9 septembre 2021 à 11h49 par Morgan Juvin

Après plus de 50 ans de carrière, le groupe Tri Yann s’apprête à dire adieu à la scène. Les "Trois Jean" se produiront une dernière fois ce samedi 11 septembre chez eux, à Nantes, sur la scène de la Cité des Congrès. Un concert dans le cadre de leur "Kenavo Tour" qu’ils ont repris le 4 septembre, dans une contexte sanitaire difficile.

Tri Yann
Crédit : Capture écran | Facebook

La formation devait initialement se produire une dernière fois au printemps 2020, mais la pandémie est passée par là. Pour Jean Chocun, chanteur et guitariste, il était impensable de ne pas mettre un point final digne de ce nom, à un demi-siècle de concerts. Entretien.

Les retrouvailles :

Comment se sont passées vos retrouvailles avec le public le week-end dernier à Nantes ?

D’abord, émouvant. Très surprenant et gratifiant de savoir que tous ces gens-là ont conservé leurs billets pendant plus d’un an. Ils ne les ont pas jetés (rires). Il y a des gens qui ont raté le coche, qui n’ont pas vu les reports mais il y en a très peu. Beaucoup se sont échangé les billets, donc, le public était présent et fidèle. Et il y avait une certaine ferveur parce que, d’une part, nous on sait qu’on ne reverra pas les gens, enfin pas dans ces conditions-là, et eux, ils savent qu’ils ne nous reverront pas en concert. Donc, il y a quand même une certaine ferveur, il y a quelque chose.

Comment se sont passées vos retrouvailles sur scène avec les autres membres de Tri Yann ?

Déjà, on avait répété quand même avant. On avait bossé un petit peu et on s’était retrouvé 15 jours avant et on était vraiment contents de se retrouver.

Les complicités se sont rapidement retrouvées ?

Oui, on a retrouvé les complicités et les automatismes. Comme quelqu’un disait, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas (rires).

Les dernières dates de la tournée :

Il reste quelques dates avant la fin de votre Kenavo Tour. Vous êtes dans quel état d’esprit ? Plutôt dans la joie ? Plutôt dans la nostalgie ?

C’est un peu entre les deux. Parce qu’on est hyper contents de réussir à faire ces concerts-là, on est à la fois heureux et émus. Mais la décision d’arrêter est prise, comme elle est prise, on ne revient pas dessus. On ne va pas faire une éternelle tournée d’adieux. Chacun a sa vie à vivre et on a beaucoup hypothéqué de nos vies personnelles pendant les 50 ans d’existence du groupe. On se reverra bien sûr mais le groupe Tri Yann va cesser ses concerts. Ça ne veut pas dire que le groupe Tri Yann va cesser d’enregistrer, d’ailleurs, on a un ou deux projets en cours, mais pour l’instant, on cesse définitivement les concerts.

Le plaisir de la scène et du contact avec le public, malgré tout ?

Ça, évidemment que ça va nous manquer mais, je crois, qu’on refuse d’y penser. On a encore quelques concerts à faire, donc, on les fait dans la joie et la bonne humeur, et puis avec de l’émotion. Quand les gens viennent nous voir avec les larmes dans les yeux en nous disant qu’ils ne nous reverront plus, forcément que ça nous émeut, évidemment.

C’est une vraie récompense en l’occurrence ?

Oui, ça fait à la fois plaisir et un peu de peine de se dire qu’on a pris une décision difficile à prendre. Mais évidemment que c’est une belle récompense. On sait qu’on fait partie de ces gens qui n’ont pas été plus que ça soutenu par les gros médias nationaux. On est un peu marginaux quelque part. On est contents de cette réussite-là, on est contents de cet itinéraire, bien sûr.

Qu'ont-ils fait pendant leur absence ?

Qu’avez-vous fait depuis le début de la pandémie ?

Quand la tournée s’est arrêtée, on était exténués. Les premiers jours, on a un peu récupéré, on a posé un peu nos valises. Et puis après, on a réfléchi et on a continué à faire des choses. Chacun vaquait à ses propres occupations et on n’a pas perdu le contact. Ça demandait beaucoup de boulot de reporter encore et encore, il y a eu je ne sais pas combien de reports depuis mars 2020 (rires). Voilà, on a vécu notre vie, on n’a pas attendu vraiment que ça se passe et on a espéré que tout ça se remette en route.

Il n’était pas question de ne pas terminer cette tournée ?

Oui, parce qu’on a un respect naturel du public. Depuis le début, le public nous porte. Et il y avait un peu plus de 9 000 billets vendus quand même. Ça aurait été vraiment un échec pour nous, ce n’était pas possible. C’est vrai que la question aurait pu se poser si, à nouveau, on avait été reconfinés. Là, tout est bien qui va bien finir, je pense.

Les projets futurs :

Quels sont vos projets futurs ?

On a un disque sur l’histoire de la Bretagne qui est en route. On va retravailler mais je ne pense pas qu’il y ait d’échéance avant 2023. Il faut qu’on se pose et qu’on travaille en profondeur. Il faut qu’on ait le temps de digérer notre fin d’existence du groupe et qu’on continue après dans la joie et la bonne humeur.

Pouvez-vous nous en dire plus sur ce disque sur l’histoire de la Bretagne ?

Depuis le début de l’existence de Tri Yann, on a fait beaucoup de titres qui se rapportaient à l’histoire de la Bretagne. On va, donc, se servir de ces titres-là en réenregistrant certains et en ajoutant quelques nouveaux titres qui manquent dans l’historique qu’on a déjà préparé.

Plus de 50 années d'activité :

Quel est votre secret de longévité ?

Au départ, c’est un groupe qui s’est créé de façon naturelle, on était potes au départ avant de faire ça. C’était une aventure de copains au départ. C’est pour ça que ça a tenu, on est très différents tous les trois mais très complémentaires.

En quoi est-ce que vous êtes différents ?

Notre vie, nos goûts et nos goûts de vie. On a quelque chose qui nous rapproche beaucoup, c’est l’intérêt musical et l’intérêt pour la Bretagne. C’est ce qui nous rapproche le plus. Ce qui nous différencie, moi je suis plutôt rural et j’habite en bord de mer, Jean-Louis est un véritable urbain et Jean-Paul se situe entre les deux. On n’a pas non plus les mêmes goûts pour les loisirs.

C’est la musique et l’amitié qui vous a lié pendant toutes ces années ?

Bien sûr ! L’amitié et la complicité. La complicité ne perdure pas sans un respect mutuel. On se respecte beaucoup et on a vachement confiance les uns en les autres.

Le dernier concert à Nantes :

A quoi faut-il s’attendre lors du tout dernier concert de Tri Yann à Nantes ?

Ça va peut-être durer dix heures (rires). Non, je plaisante mais ça peut durer un bon moment aussi, on ne calcule pas trop. On montera sur scène et on redescendra quand on aura fini.

 

(Entretien retranscrit par Mikaël Le Gac)